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Togo/Hausse des tarifs de l’électricité : une réforme à expliquer et à rééquilibrer au nom de la justice sociale

La récente décision d’augmenter les tarifs de l’électricité, tout en introduisant des charges fixes, suscite une vive inquiétude dans un contexte où la cherté de la vie fragilise déjà de nombreux ménages. Cette mesure, bien qu’inscrite dans une vision d’autonomie énergétique à moyen terme, semble à contre-courant des attentes sociales actuelles et manque d’un cadre explicatif suffisant pour obtenir l’adhésion des citoyens.

Il y a peu, le gouvernement avait pourtant pris une décision saluée par les couches vulnérables, en abaissant le tarif de l’électricité pour les ménages en prépayé consommant moins de 30 kWh par mois, le faisant passer de 114 FCFA à 70 FCFA/kWh. Cette mesure visait à soulager les foyers modestes tout en améliorant l’accès à l’électricité. Mais quelques mois plus tard, la mise en place de charges fixes atteignant jusqu’à 2320 FCFA par mois par exemple pour un compteur prépayé de 10A ainsi que la hausse du prix du kWh, viennent effacer cet acquis pour les plus démunis.

Ces nouvelles dispositions frappent plus durement les petits consommateurs souvent les plus pauvres qui peinent déjà à joindre les deux bouts. Pendant ce temps, ceux qui consomment davantage généralement les ménages les plus aisés continuent de bénéficier de subventions implicites proportionnelles à leur forte consommation. Ainsi, plus on consomme, plus on bénéficie indirectement de l’aide publique, alors que les petits consommateurs, eux, payent proportionnellement plus cher.

Il est donc légitime de se demander : cette réforme ne risque-t-elle pas d’aggraver les inégalités ? Ne mérite-t-elle pas une révision pour garantir plus d’équité ?

Par ailleurs, une réforme d’une telle envergure aurait mérité une meilleure communication. À ce jour, ni le gouvernement, ni la CEET, ni l’ARSE n’ont expliqué de façon claire et pédagogique aux populations les raisons profondes de ces changements, ni les mécanismes de compensation envisagés pour protéger les plus vulnérables. Cela crée un climat d’incompréhension, voire de méfiance, qui aurait pu être évité par une approche plus inclusive et transparente.

Nous reconnaissons l’ambition légitime du pays à atteindre l’autonomie énergétique. Mais cela ne peut se faire au détriment de la cohésion sociale. D’autres pistes existent notamment une meilleure redistribution des subventions, une taxation progressive en fonction de la consommation, ou encore des incitations claires à l’efficacité énergétique pour les gros consommateurs.

Il serait judicieux que les décideurs réévaluent les effets sociaux de cette réforme et envisagent des ajustements pour en faire un levier de justice sociale, et non un facteur d’exclusion. L’énergie n’est pas un luxe, c’est un droit fondamental qui conditionne l’accès à l’éducation, à la santé, et à une vie digne.

Ali TOSSA

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